[Flashback] Des livres et des mots {feat. Ezra Yaxley}

La solitude, en sortant de l’hôpital, avait bien été la dernière chose dont j’avais besoin. Ne nous méprenons pas. J’ai eu du travail à faire aussi, du rattrapage dans mes études et de quoi m’occuper, mais les soirs où Moira était près de moi, où nous discutions de tout et de rien comme deux complices, où nous nous laissions aller à la luxure sans se soucier des conséquences, ça me manquait. Noël a été calme pour moi cette année, n’ayant pas assisté à la fête à laquelle notre famille avait été conviée. Je suis également resté seul au Nouvel An. Déjà, je ressentais le poids de la solitude, Moira étant un peu distante avec moi. Je ne la blâme pas, elle a raison de l’être, mais la culpabilité est revenue m’étreindre comme une vieille amie. La culpabilité, la honte, la solitude, la déprime… Je savais que j’avais tout gâché. C’est donc au début de janvier que j’ai fait ma première rechute.

Moira dormait dans sa chambre, prétextant avoir beaucoup de travail et même si j’avais envie de la croire, je savais au fond de moi qu’elle me fuyait. Je l’ai blessée, et je mérite ce traitement. J’ai essayé de m’en sortir seul. J’ai arrêté de boire à nouveau, mais alors les cauchemars sont revenus. Ces cauchemars, je ne les faisait plus que très rarement quand j’avais Moira à mes côtés. Que je recommence à les faire me paru comme étant un signe que j’ai besoin de mon épouse dans ma vie. Pourtant, j’ai été un lâche en ne disant rien. Je l’ai laissée s’éloigner un peu plus à tous les jours, essayant de survivre par moi-même. Pour y arriver, j’ai fait quelques rechutes, ironiquement.

Je me suis couché tôt ce soir, espérant retenir mes envies d’alcool et ne pas déprimer en pensant à Moira sans arrêt, et à la culpabilité que j’éprouve envers elle. Je l’ai laissé prendre ses distances, je l’ai laissé respirer, mais mon lit est froid depuis que j’ai quitté l’hôpital. Pourtant, je suis en train de suer. Je m’agite également. Je suis en train de faire un de mes nombreux cauchemars dans lesquels maintenant, c’est Moira que je perds. Je me réveille en sursaut, en sueur. Je n’en peux plus de ces cauchemars. Mon âme trouble a besoin d’une détente et je sais quoi faire pour l’apaiser. Cette nuit, je vais encore rechuter sans que personne n’en sache quoi que ce soit, et je me déteste pour ça déjà en avance.

« Lumos. » Un murmure plus tard, une faible lueur blanche apparaît au bout de ma baguette. Ne portant que le bas de mon pyjama, j’enfile mon peignoir et sort de ma chambre sans un bruit. Il fait très sombre dans le manoir la nuit, alors je n’ai aucun mal à voir la faible lueur de la bouger émaner de la chambre de mon épouse. Sa chambre… Je ne pensais pas que nous allions refaire chambre à part après notre mariage, après tant de temps passés à batifoler ou simplement s’apprécier en discutant. J’ai sérieusement tout gâché, et ces pensées me poussent à aller descendre l’escalier pour aller au study où j’ouvre une bouteille et sert un verre. Au moment de boire ma première gorgée, je m’arrête. Ma main tremble. Je baisse les yeux, déprimé encore plus qu’à mon réveil. À nouveau, j’ai envie d’en finir avec ma vie alors que j’ai reprit conscience pour Moira. À boire encore plus, je vais me détruire, et lui faire davantage de mal.

Je dépose le verre et quitte le study. Je remonte l’escalier et me dirige vers la chambre de Moira. J’ai besoin d’aide. J’ai besoin d’elle. Du bout de mon index, je frappe délicatement sur la porte pour ne pas réveiller les autres, mais je n’ai aucune réponse. Peut-être s’est-elle encore endormie la tête dans ses bouquins. Ce n’est pas la première fois que je viens la voir et la trouve ainsi, après tout. Ainsi, j’ouvre la porte et la referme derrière moi. Je l’observe ensuite quelques secondes et agite ma baguette. Doucement, son libre quitte son ventre pour aller se ranger et la couverture vient se placer sur Moira. Je baisse alors les yeux tristement. Je m’apprête à agir en lâche à nouveau et à ne pas la réveiller pour lui demander de l’aide. Je regarde ensuite la bougie et l’éteint d’un autre coup de baguette. Je suis éclairé par mon lumos, mais je ne vois pas vraiment loin devant moi. Je ne vois même plus Moira. Le regard triste, je baisse les yeux, hésitant. La lâcheté prend le dessus et je me retourne, près à repartir a study.

Elle n’est pas disponible pour moi, une fois encore. Elle dort profondément. Est-elle paisible sans moi ? Pourquoi est-ce que je me pose cette question ? Pourquoi est-ce que je suis inquiet qu’elle le soit ? Pourquoi est-ce que ça me fait du mal de ne pas être près d’elle ? Pourquoi aie-je l’impression que ma détresse n’est plus due au deuil ? Moira me manque tellement. Je me sens aussi seul que lorsque ma née moldu est morte, dans les premiers temps. Les yeux sur Moira, je la trouve si belle et l’envie ne manque pas de la rejoindre sous la couette, mais à la place, j’éteins la bougie et me retourne pour aller vers la porte. Mon Lumos toujours ouvert, c’est sans doute pour cette raison qu’elle sait que c’est moi qui est dans sa chambre. Quoi qu’elle s’en serait probablement douté même sans, puisque personne ne vient ici sauf moi.

Quand elle dit mon nom, je m’arrête et baisse la tête. Je ne répond pas. Elle se lève et vient me rejoindre, posant sa main sur mon bras qui tient la poignée de porte. Elle me demande si ça va et je détourne les yeux, mon visage faiblement éclairé par le lumos. Je ne sais pas quoi lui dire. Si je lui dis la vérité, elle va s’en vouloir. Si je lui dit que ça va, je lui aurai menti. Le coeur gros, je ferme les yeux, puis elle retire sa main de mon bras. Je rouvre donc les yeux, sans toujours la regarder. Et elle me présente ses excuses. Finalement, ne rien lui dire aura été aussi pire que de dire que je vais bien ou non. Je sais qu’elle s’en veut. Je ne veux pas qu’elle s’en veuille. Pourtant, je ne lui dis rien par rapport à ça maintenant. Je ne veux pas tourner autour du pot et je suis trop épuisé pour prendre des gants blancs.

« Moira… J’ai rechuté. » Je tourne la tête vers elle, sans pour autant la regarder. Pourtant elle peut voir, grâce à mon lumos, la détresse dans mon regard. « Je… » Les mots se coincent dans ma gorge que je racle pour arriver à parler. Je tremble un peu. J’ai rechuté plusieurs fois, et je suis sur le point de le refaire ce soir. « Je sais que tu préfère être seule et loin de moi, mais… » Si elle me dit de sortir. Je sortirai et j’irai boire mon verre, seul. Si elle me dit de sortir, je serai perdu. « Peux-tu me laisser rester avec toi cette nuit ? » Je pose mon regard triste et coupable dans le sien. J’ai l’air d’avoir fait une bêtise. « J’ai un verre de whisky déjà prêt qui m’attend au study… S’il te plaît, laisse-moi rester. » Mon ton est presque suppliant. Ma demande est un appel à l’aide. Je vais me détruire si je dois rester seul avec moi-même encore longtemps.

J’ai du mal à la croire quand elle me dit qu’elle ne préfère pas être seule. C’est sans doute pour cette raison que je ne réagis pas à cette affirmation. Après tout, si j’étais à sa place, moi aussi je préfèrerais la solitude plutôt que d’endurer ma compagnie. Je lui ai brisé le coeur. Je comprends totalement qu’elle puisse vouloir mettre de la distance entre nous. Même moi j’ai du mal à vivre avec moi-même. Malgré cela, je lui demande si elle peut me laisser rester avec elle cette nuit. Je sais trop bien que je vais boire plus d’un verre si je passe cette porte. Je suis au plus bas et je ne dirais pas non pour atténuer la douleur. Contre toute attente, sa main glisse le long de la manche de mon peignoir pour se rendre jusqu’à ma main sur la poignée. Je la relâche et laisse Moira m’entraîner au lit. C’est donc sa réponse. Je peux rester. Je suis rassuré.

Elle m’incite à m’asseoir jusqu’au lit et je m’exécute, baissant les yeux. Ma baguette dans ma main, je joue avec, la faisant rouler entre mes doigts comme pour me donner une contenance. J’ai l’air vidé, comme si j’avais perdu mon âme, comme si j’avais tellement souffert que la souffrance ne me faisait plus de mal. Mon visage a l’air neutre, mais mes yeux ne le sont pas. La détresse, la tristesse, la solitude, la culpabilité, la honte. Je ne vis pas bien dans ma peau. Mon comportement est redevenu auto-destructeur, comportement qui s’était un peu dissipé quand Moira et moi passions du bon temps.

Elle est la première à prendre la parole. C’est vrai qu’elle m’a dit qu’elle ne me laisserait pas tomber, mais contrairement à ce qu’elle raconte, je ne lui en veux pas. Tout au plus, ça me rend triste, mais pas en colère. Moi aussi je lui ai fait de la peine. C’était mérité. Elle me dit que j’ai bien fait de venir ce soir. Elle tend le bras et pose sa baguette et je lève enfin les yeux sur elle. Quand elle me demande combien de fois j’ai rechuté, je pose à nouveau les yeux sur mes mains et ma baguette, haussant faiblement les épaules. « Je ne sais pas trop… Plusieurs fois. Chaque fois que je me suis senti seul, ou que je ne supportais plus mes cauchemars… » Des cauchemars qui alternent entre mes souvenirs d’Elle, et la perte de Moira, que ce soit après une dispute et un divorce, ou par son assassinat, ou son suicide. À chaque fois, je me réveille terrassé. « Je ne t’en veux pas Moira. Je t’ai brisé le coeur et je comprends tout à fait pourquoi tu as mis de la distance entre nous. » À nouveau, je la regarde. « Mais tu me manques. » Mon regard se voile de tristesse et je baisse à nouveau les yeux.

Ma baguette trahi mes tremblements, alors j’éteins mon Lumos et la dépose à côté de cette de Moira. La pièce est maintenant plongée dans le noir et je peux trembler autant que je le veux sans qu’elle ne le vois. Pourtant, je suis persuadé qu’elle doit ressentir ma détresse juste en étant assise à côté de moi. « Je n’arrête pas de rêver que je te perds depuis trois semaines. Séparation, divorce, disparition, mort… À chaque fois, c’est insupportable, et à chaque fois j’ai besoin d’un verre. Ce n’est pas la première fois que je viens te voir, mais à chaque fois je n’ai pas le coeur de te réveiller. » À la place, je me suis contenté à chaque fois de l’installer plus confortablement dans son lit pour éviter qu’elle soit mal le lendemain, ou qu’elle ait froid la nuit. J’ai éteint ses bougies, mis sa baguette sur sa table de nuit, replacé ses oreillers… Il n’y a rien que je n’ai pas fait pour qu’elle soit bien. Mais je garde tous ces détails pour moi. « Alors j’allais boire. Un verre ou deux. »

Jusqu'ici, je n'ai à déclarer aucun mal de ventre, aucun malaise quelconque. Je doute fortement que l’alcool ait fait de gros dommages, ou du moins rien que mon corps n’ait pas pu gérer. L’important c’est que j’arrête avant que ça ne redevienne grave. En revanche, être sobre est difficile. On dirait que boire de l’eau me donne mal au cœur, parfois. Chaque minute est un combat et vivre avec la solitude m’a fait perdre le combat à plusieurs reprises. J’ai honte. Je n’ose à peine regarder Moira. Pour me cacher, j’ai fermé la lumière, mais elle la rallume sa bougie après avoir reprit sa baguette. Impossible de rester caché. Elle plonge donc son regard dans le mien qui capitule, et je l’écoute me dire qu’elle a agit comme une enfant gâtée. Je baisse les yeux puis secoue la tête légèrement. Je ne répète pas que je ne lui en veux pas. Je pense que c’est inutile. Elle voudra essayer de me convaincre qu’elle a tort, et je voudrai la convaincre que moi aussi j’ai mes torts, et ça n’en finira jamais. Je n’ai pas envie d’insister sur ça. C’est futile. Je n’en ai pas l’énergie.

Elle me dit qu’elle aurait préféré que je la réveille, je hausse les épaules et elle interrompt sa phrase, comme pour chasser l’idée que je puisse me rendre malade à nouveau. Je baisse les yeux devant moi à nouveau. Si ce n’était pas à cause d’elle, je serais déjà mort. Je serais même déjà enterré dans le caveau familial. Moira était le souffle de vie qu’il m’avait fallu pour que je vive plus longtemps, et je voulais maintenant entretenir ce souffle. J’étais revenu pour elle, après tout, car mis à part elle, il n’y a personne qui puisse avoir assez de valeur à mes yeux pour me faire endurer la vie ainsi. Sa main glisse dans la mienne et elle se rapproche. Je serre sa main, comme pour me convaincre que c’est réellement en train de se produire. Quand elle me dit qu’elle veut qu’on reparte de zéro, je tourne la tête vers elle pour écouter la suite. Elle me dit qu’elle ne peut pas ignorer ses sentiments pour moi, mais qu’elle aimerait qu’on se retrouve, qu’on partage de nouveau ma chambre. Elle veut se rattraper et me laisser seul a été sa pire bêtise. Je ne dis toujours rien. Je suis très silencieux et admire sa beauté.

Elle se colle à moi pour poser sa tête sur mon épaule. Je serre sa main un peu plus. Je n’ai aucune envie de la repousser. Mon cœur bat plus vite, et plus fort. Cette sensation m’avait manquée. Je pose ma tête sur la sienne. Elle me demande de rester avec elle ce soir, et mon cœur s’emballe un peu. « Je te l’ai demandé en premier. » Le fait qu’elle me le demande me fait rassure énormément. Je me détends un peu. Ma main de libre vient prendre sa joue, et je plonge mon regard dans le sien. « Arrêtons de nous détruire, toi et moi. Contentons-nous de seulement être bien ensemble. » De mon pouce, je caresse sa joue tendrement, la regarde comme si j’avais le plus précieux des trésors devant moi. « Je vais rester ce soir, et demain aussi. Et tous les jours après, Moira. Je veux juste être près de toi. Je veux être bien, et je veux que tu le sois aussi. » Quite à me donner corps et âme et même le cœur à elle. Même si je dois faire semblant d’être amoureux.

Semblant ? Vraiment ?

J’ai fait exprès pour ne pas parler de sentiments. Je ne veux pas faire de promesse. Je ne veux pas être celui qui lui aura promis monts et merveilles alors que je ne suis qu’un sorcier lâche et sans parole. Je préfère donc lui proposer de seulement être bien ensemble, ce qu’on était avant mon anniversaire. Ainsi, je ne m’engage pas à tomber amoureux d’elle, ou de lui faire croire que je le suis. Le fait que je tienne à elle devrait déjà être suffisant, non ? Elle hoche la tête. Elle est d’accord pour qu’on arrête de se détruire et qu’on soit seulement bien. Je caresse sa joue et lui dit que je veux juste être bien et qu’elle le soit aussi. C’est important. Mes sentiments, au fond, ne devraient pas être important. Je suis avec elle et je lui reste. C’est ça l’important non ? Qu’importe ce qui pourrait se passer, Moira m’aura à ses côtés, ma main dans la sienne.

Elle m’observe un moment et je fais de même. Elle me dit à nouveau de rester et je hoche la tête, souriant légèrement. Sa tête se redresse et elle lâche ma main pour venir prendre mon visage en coupe. J’ai peut-être perdu un peu de poids, n’ayant eu que peu d’appétit et davantage de sommeil. Après tout, mon corps travaillait sans cesse pour se regénérer alors j’ai été fatigué en permanence. J’ai rarement faim quand je suis fatigué. C’est probablement ça qui me fait avoir l’air si pâle. Ça et le fait que je ne prenne pas de soleil. Les seules fois où je suis sorti, c’est pour aller dans le jardin prendre l’air. Bref, nos regards se perdent l’un dans l’autre. Moira ne dit rien et je me demande ce à quoi elle peut penser. Je suis Occlumens, mais pas encore Legilimens, alors je ne sais pas lire dans la tête des autres.

Le silence occupe l’espace entre nous alors qu’on s’observe, comme si on cherchait à se remettre sur la même longueur d’onde. Puis Moira lâche mon visage pour se lever. Elle se place devant moi et je l’accueille dans mes bras quand elle vient enfouir son visage dans mon cou. Je la serre contre moi, la sentant fragile, et sa voix me témoigne de sa peine quand elle s’excuse à nouveau. J’inspire en la serrant un peu plus. « Ne t’excuse plus Moira, s’il te plaît. Tu te fais du mal, et ça ne m’aide pas. Tournons la page maintenant, ensemble. » Je n’ai pas envie qu’elle s’excuse. Je n’ai rien à lui pardonner. Je sais qu’elle s’en veut et cette culpabilité va la ronger longtemps si je n’y met pas fin maintenant, et ce n’est pas ce que je veux. « Soyons bien, ensemble… » Je pose un chaste baiser dans son cou, puis caresse son dos avec ma main, sans jamais mettre fin à cette étreinte. Je ferme les yeux et ne fait que profiter.

Après un moment, je souris. « Je suis bien là. Pas toi ? » L’une de mes mains vient prendre sa joue pour l’inciter à me regarder. L’une de mes mains reste dans le bas de son dos tandis que l’autre replace une mèche de ses cheveux. « Je suis rassuré de ne pas t’avoir perdu. Je ne sais pas ce que j’aurais fait sans toi. Je n’y aurais pas survécu je pense. » Ma voix n’est que murmure. Passé une heure du matin, tout le monde dort, mais mon murmure vient surtout du fait que ce moment est plus ou moins intime. Nous sommes dans notre cocon, et murmurer ne rend le tout que plus personnel encore. Ma main vient à nouveau prendre sa joue et je pose mon front contre le sien, fermant les yeux. Puis je prends l’initiative de poser mes lèvres sur les siennes. Sans penser plus loin, j’avais juste besoin de ressentir un peu de cette chaleur qu’elle me donne. En espérant ne pas envoyer le mauvais message.

Tenir Moira dans mes bras est d’un soulagement sans nom. Je me sens paisible, calme, apaisé. Si l’alcool est mon poison, Moira est mon antidote. J’ai besoin d’elle, c’est évident. C’est impossible de démentir cela et je ne le cache pas non plus. Mes parents ont bien remarqués qu’elle et moi passions un mauvais temps mais j’ai dit que c’étais moi qui avait un problème, et non le contraire. Il faut dire qu’ils sont les derniers à qui j’ai envie de demander conseil face à ma relation avec elle, et j’en veux amèrement à mon père d’avoir pu croire que Moira m’avait fait du mal. Je me suis même disputé avec lui à ce sujet quand il est venu me revoir à l’hôpital. Si ce n’était pas clair pour lui avant, il sait désormais que la femme qu’il a choisie pour moi, je la défendrai et la protègerai corps et âme de tout, même de lui. C’est un peu, en même temps, une façon de me venger.

Je lui demande si elle est aussi bien que moi et elle me répond que oui, que ça lui avait manqué. Je souris. Je la regarde alors et replace la mèche de ses cheveux qui ne veut pas rester en place. Je lui murmure alors que je suis rassuré de ne pas l’avoir perdue, sans quoi je n’aurais sans doute pas survécu. Je ne dis pas cela avec tristesse, mais c’est pourtant ce qui voile un peu le regard de Moira quand je lui dis une chose pareille. J’aurais dû me taire. La fatigue ne m’aide pas à réfléchir. Pour rattraper le coup, je décide de l’embrasser. Je la sens réceptive et ça me fait plaisir. Il faut dire que j’avais envie de ce baiser depuis deux mois au moins. La douceur et le goût de ses lèvres m’avaient manqué. Le reste aussi, mais le reste sera à découvrir un autre jour. Moira semble sur la même longueur d’onde sans qu’on s’en soit parlé et ça me fait chaud au cœur.

C’est elle qui met fin au baiser, son corps collé contre le mien que je serre, comme pour l’interdire de m’échapper. Elle me demande si j’ai besoin de quelque chose, vu ma pâleur. Je lui souris et caresse à nouveau sa joue. « Ne t’inquiète pas. Je me sens bien. Même très bien. Je ne suis pas beaucoup sorti dehors depuis mon anniversaire. C’est peut-être ça. Mais je ne dirais pas non pour dormir. Ça nous fera du bien à tous les deux. Je t’ai réveillé après tout. » Je lui souris et la serre à nouveau contre moi. J’ai maintenant du mal à la relâcher. C’est mal. Mais si je relâche, rien ne me garantie pas qu’elle me laissera. « Tu préfères rester ici ou tu veux qu’on retourne dans notre chambre ? »

Doucement, je secoue la tête quand elle me demande si je ne suis pas sorti pour les cours. « Je suis resté ici et j’ai fait mes travaux à la maison. » J’ai réussis à faire prolonger mon congé de convalescence. Sans doute grâce à des petites manipulation de mon père qui préfère m’avoir à l’œil. Elle enfouie son visage dans mon cou et machinalement, ma main vient caresser ses cheveux derrière sa tête. Elle me dit que ça ne fait rien pour son sommeil puisqu’elle a l’habitude avec les études et les cauchemars. Ça va devoir changer ça. Tout comme je sais qu’elle va prendre soin de moi, je vais prendre soin d’elle. Je lui demande où elle préfère dormir et me regarde à nouveau. Elle préfère regagner notre chambre et ça me fait plaisir. Ainsi, c’est parfait. Elle aura un endroit pour séparer repos et travail. Déjà, elle aurait dû investir le study pour travailler confortablement, au lieu de travailler dans son lit.

Elle défait alors ses cheveux et j’admire sa beauté. Elle me dit qu’elle doit passer à la salle de bain et je hoche la tête sans rien dire. Je la secoue ensuite quand elle me demande si je veux l’accompagner. « Je vais t’attendre dans le lit. » Elle se défait de mes bras et je me lève pour sortir de la chambre avec ma baguette. Je suis sur le point de sortir quand elle m’embrasse sur le nez. Je souris et la laisse filer avant d’aller dans notre chambre où je me réinstalle de mon côté du lit, celui de Moira étant encore fait. Je ferme les yeux doucement et est sur le point de m’endormir quand elle revient dans la chambre. J’ouvre alors les yeux et sourit en la regardant. Ça me fait plaisir de la revoir entre ces murs.

Elle grimpe dans le lit et vient se blottir contre moi. Je la serre dans mes bras, apaisé de la sentir contre moi. À nouveau, je ferme les yeux, inspirant profondément, apaisé. Son odeur m’enivre et je souris légèrement. Je suis tellement mieux qu’à mon réveil. C’est surprenant. Personne avant Moira n’avait pu avoir cet effet sur moi. Moira murmure que les cauchemars ne seront plus d’actualité cette nuit et je hoche faiblement la tête. « J’en suis sûr. » Je bouge alors la tête pour embrasser son front et la serre un peu plus contre moi. « Bonne nuit Moira. » Les yeux fermés, je ne remets pas de temps à m’endormir. Maintenant, je rêve de choses plus agréables, comme Moira et moi qui nous rencontrons pour le déjeuner à Galdbury, ou mes supposés amis. Le dernier rêve que je fais est plus intime, personnel, et je suis bien.